LES AVENTURES DE FINKIE
CHAPITRE 1:De l'enfance du Maître et de sa prédestination
Dès sa prime jeunesse, Finkie reçut les stigmates de la pensée complexe. Il semblait qu'une bonne fée barbue se fût penchée sur son berceau pour lui insuffler l'esprit philosophique. A cinq ans, en effet, on n'aurait pu trouver, à des lieues à la ronde, un enfant aussi laid, ce qui était un signe d'élection. On ne pouvait le regarder sans être ému de le voir manger si salement. Ses cheveux, de la couleur des poils d'un balai de sanisette, trempaient dans sa soupe, lui faisant comme une deuxième cuiller qu'il lapait à la fin du déjeuner. Aux remarques que ses parents ne manquaient pas de lui faire, il répondait par un fier mouvement du menton qu'il avait en galoche, et en poussant un juron socratique qui faisait naître en sa narine une grosse bulle de morve. "Une telle saleté, pensaient M et Mme Finkie, est à coup sûr l'indice d'une nature délicate et spirituelle qui ne peut s'accomoder des mesquineries du savoir-vivre". Ainsi, ils n'estimaient pas de leur devoir de contrarier durablement les instincts de leur divin enfant. Après déjeuner, ils le laissaient, à sa guise, se vautrer dans la boue de leur jardin, brouter l'herbe et les pâquerettes, ruminer un long temps avant de s'endormir au creux d'une bauge où il finissait par s'abîmer dans une longue rêverie, suivie d'une longue sieste qui durait jusqu'à six heures du soir. Ensuite, il convenait de lui faire prendre son bain. Mais la chose était délicate car le sauvageon couvert d'herbes, de racines et de feuilles, ses cheveux devenus le refuge inexpugnable des coccinelles, lombrics et autres cloportes, ne pouvait que salir les carreaux de faience rose bonbons qui ornaient la salle d'eau de Mme Finkie. On décida donc de le décrotter sur place à l'aide d'un Kärcher. Selon certains psychanlystes et biographes, c'est le souvenir de ces séances musclées de décrottage enfantin qui poussa Finkie, devenu adulte et nouveau philosophe, à préconiser l'utilisation du même instrument pour éliminer les arabes et les noirs intégristes totalitaires. Il serait d'ailleurs du plus haut intérêt de savoir si Sarkozy n'a pas connu une enfance similaire, ce qui expliquerait bien des choses.
Mais revenons à nos moutons. Une fois Finkie nettoyé, on le nourissait à nouveau. Comme il avait passé l'après-midi dans une contemplation active de la Nature, cherchant sans doute déjà à percer les secrets de la matière, il avait grand faim et ne se satisfaisait pas de particules alimentaires. Ses parents, soucieux de sa santé, sinon de son taux de cholestérol eurent recours aux services d'un traiteur qui lui confectionnait Makroud, cornes de gazelles et gâteaux au pavot par centaines. L'effet presque automatique d'un tel régime alimentaire fut qu'il eut très vite la peau luisante et grise, et que, plus tard, on put suivre heure par heure la progression sur son visage, de rivières de Sebum ainsi que l'explosion concomittante d'une acnée purulente, laquelle ourlait délicatement sa figure d'un camaïeu de points noirs, blancs et rouges. Mais, pour l'heure, notre nouvel Aristote ne s'en souciait guère tout à sa joie dévorante et concentré sur son étude emprique de rerum natura.
On le couchait enfin dans un petit lit à barreaux qu'il conserva jusqu'à l'âge de dix-sept ans. C'est lorsque ses parents entendaient ses ronflements qui faisaient trembler les murs de la maison dont ils écartaient par ailleurs les moustiques et les témoins de Jéhovah, qu'ils pouvaient enfin s'adonner à leur occupation favorite: une partie de 1000 bornes avec leurs voisins.
A suivre